INGRID MACINTOSH : Bonjour, bonne année et bienvenue au balado TDAM Talks. Il s’agit de notre épisode spécial sur les perspectives que nous réserve l’année à venir. C’est toujours l’un de nos épisodes de boule de cristal les plus attendus, dans lequel on examine les rebondissements et les revirements du monde financier et les tendances qui pourraient, et c’est à prendre avec beaucoup de prudence, façonner les marchés au cours de l’année à venir. Mon nom est Ingrid MacIntosh. Et aujourd’hui, je souhaite la bienvenue à David Sykes, le chef des placements de Gestion de Placements TD, qui est de retour parmi nous et qui sera le premier à nous dire qu’il n’existe aucune boule de cristal. Mais examinons les tendances et les sujets pour l’année à venir. Alors, David, bon retour parmi nous. Ça faisait longtemps.
DAVID SYKES : Bonjour, Ingrid, je suis heureux de vous voir. Merci de l’invitation.
INGRID MACINTOSH : OK, on en plaisante beaucoup, mais quelle est votre vision philosophique sur les prévisions annuelles?
DAVID SYKES : Eh bien, les prévisions pour l’année sont intéressantes.
INGRID MACINTOSH : Divertissantes.
DAVID SYKES : Divertissantes. C’est un exercice nécessaire. Mais je dirais que je peux toujours faire beaucoup de prédictions. Mais que ma confiance dans ces prédictions est plutôt faible. Je pense que ce qui est plus important pour nous en tant qu’investisseurs et équipes de placement, n’est pas de se concentrer seulement sur les douze prochains mois, mais aussi sur les 36 et 60 prochains mois et sur les dix prochaines années. On adopte vraiment une perspective à long terme. Essayer de faire une supposition logique sur ce dont seront faits les 12 prochains mois est terriblement amusant. Mais encore une fois, ce qui est vraiment important pour nous, c’est que notre équipe est composée de personnes qui s’en tiennent à un processus de placement très, très rigoureux. En y réfléchissant bien, ma confiance dans ce processus est extrêmement élevée. Je pense à nos divers gestionnaires de portefeuille et à nos équipes d’analystes et à la rigueur avec laquelle ils doivent composer chaque jour pour s’assurer de suivre un processus qui continuera de trouver des entreprises qui peuvent rembourser leur dette, accroître leurs flux de trésorerie et augmenter les dividendes versés aux actionnaires. C’est véritablement ce en quoi j’ai le plus confiance. Mais je suis ravi de parler de l’année à venir. Je suis ravi de faire toutes sortes de prédictions. Mais on verra si elles se réalisent ou non.
INGRID MACINTOSH : Eh bien, ce que j’aime avec les prévisions pour l’année, c’est que nous les enregistrons. Donc je peux écouter celles de l’an dernier et savoir si on a vu juste. Et devinez quoi? C’est ce que j’ai fait. J’ai écouté le balado 2023 des perspectives annuelles. Je crois qu’on a vu juste sur beaucoup de points. C’est comme le secret de l’humour. Demandez-moi quel est le secret de l’humour.
DAVID SYKES : Quel est le secret de l’humour?
INGRID MACINTOSH : C’est le choix du bon moment. On va parler de beaucoup de choses qu’on avait prévues, de la façon dont elles se sont déroulées, et on va regarder vers l’avenir. Mais si on regarde en arrière. On a parlé des taux d’inflation et de la géopolitique. On n’aurait probablement pas pu prédire ce qui s’est passé. Mais peut-être pourriez-vous nous dire où on en est à la fin de 2023, par rapport à ce qu’on avait prévu.
DAVID SYKES : Oui, je pense que si on recule d’un an, on parlait des taux d’intérêt élevés qui continuaient de grimper. Mais on pensait qu’à un moment donné, la tendance s’inverserait et que les taux baisseraient. Je pense qu’ils ont considérablement diminué vers la fin de 2023. Les titres à revenu fixe ont inscrit de solides rendements. C’était vraiment à la toute fin de 2023. Ça a pris un peu plus de temps. Je pense qu’on a assisté à un rebond très important des marchés boursiers, très net…
INGRID MACINTOSH : Surprenant, vraiment, quand on y pense.
DAVID SYKES : Très net.
INGRID MACINTOSH : Pouvez-vous mettre cela en contexte pour les gens? Où en est-on à la fin de l’année par rapport à il y a trois mois?
DAVID SYKES : Oui, on a progressé de 12 % à 15 % au cours des deux derniers mois, selon les principaux indices. Ça a été un changement énorme. Aux États-Unis, les taux obligataires sont passés d’environ 5 % pour un bon du Trésor à 3,9 % maintenant, ce qui représente un mouvement énorme au cours des trois dernières semaines et demie. Ce qui m’intéresse, ce sont les placements alternatifs. Si je pense à l’immobilier, à l’immobilier mondial, il a fait beaucoup mieux qu’on pensait. Dans un contexte de hausse des taux, dans un monde postpandémique, avec beaucoup de questions sur l’inoccupation des immeubles de bureaux, on a enregistré des rendements positifs dans cette catégorie d’actif. Ça a été une très bonne surprise. Mais je dirais qu’en cette fin 2023, tout le monde sait que les taux ont fortement augmenté au cours de l’année. On a vu une amélioration sur le plan de l’inflation. Aux États-Unis et au Canada, l’inflation était de 8 % ou 9 %. On en est maintenant à 3 % ou 4 %, selon la mesure que vous utilisez. Il ne fait aucun doute dans mon esprit que si on regarde vers l’avenir, vous allez voir les répercussions de ces hausses de taux. Elles se manifesteront de diverses façons. Mais sur le plan économique, l’inflation a beaucoup diminué. Et la croissance commence à ralentir. Au Canada, le ralentissement est plus important qu’aux États-Unis.
INGRID MACINTOSH : Voyons ça un peu plus en détail. C’est ce que nos auditeurs adorent : détaillons les catégories d’actif et voyons ce qu’on peut en dire. À un niveau général, doit-on être optimiste, pessimiste, ou neutre à l’approche de 2024?
DAVID SYKES : Je dirais neutre à optimiste, mais encore une fois, ça dépend de la catégorie d’actif.
INGRID MACINTOSH : OK, les actions?
DAVID SYKES : Pour les actions, je pense qu’il est juste de dire que les bénéfices ont été beaucoup plus résilients que prévu en 2023. Par rapport à l’année précédente, chaque trimestre affichait une faible tendance à la baisse. Au troisième et au quatrième trimestre, on pouvait s’attendre à une croissance négative des bénéfices sur douze mois. Mais vers la seconde moitié de l’année prochaine, malgré un ralentissement assez important de l’activité économique, la croissance des bénéfices sur douze mois devrait se redresser. La croissance sera donc positive sur le plan des bénéfices. Il y a des questions sur les ratios. On envisage des rendements de l’ordre de 4 %, 5 % ou 6 % pour l’an prochain. Du moins au Canada, les rendements en dividendes sont très élevés. Avec quelques évaluations à la hausse aux États-Unis. L’Europe a connu une année correcte en 2023 en ce qui concerne les actions, mais je suis moins optimiste à l’égard de l’Europe. Je pense que la Chine a encore pas mal de travail à faire. Mais dans l’ensemble, je dirais que si on regarde vers 2024, on devrait voir des rendements moyens à un chiffre.
INGRID MACINTOSH : Pour bon nombre de nos portefeuilles d’investisseurs, les obligations représentent une part importante. Quelles sont les perspectives pour les obligations?
DAVID SYKES : Comme je l’ai mentionné, on a assisté à un mouvement important. Mais je pense qu’il y aura encore plus de hausses à venir. Encore une fois, selon la région, la Fed, la Banque du Canada, mais plus la Fed, ont indiqué qu’elles baisseraient les taux. La Banque du Canada a dit que ce serait au courant de 2024. Dans ce contexte, on croit quand même que les taux peuvent encore baisser. N’oubliez pas qu’avec les titres à revenu fixe, il n’y a pas que la durée qui compte, alors que quand les taux baissent, les taux effectifs chutent et vous obtenez un gain en capital. Vous obtenez aussi le revenu. Les taux effectifs à l’approche de la fin d’année se situent dans la fourchette de 4 % à 5 %. Je pense qu’on devrait s’attendre à des dividendes élevés à un chiffre sur le marché des titres à revenu fixe.
INGRID MACINTOSH : C’est une excellente prévision. Par rapport au début de l’année, où on n’avait pas cette protection du taux courant. Aujourd’hui, on a du net net. Les investisseurs dans les titres à revenu fixe sont dans une bien meilleure position. Qu’en est-il des placements alternatifs et immobiliers?
DAVID SYKES : Du côté non conventionnel, on parle des placements alternatifs. Mais en fait, si nous les divisons en sous-catégories, à une extrémité, un secteur à très court terme, qui serait nos prêts hypothécaires commerciaux. Si le taux est de 7 % aujourd’hui, la durée est d’environ deux ans. On est donc très enthousiastes, favorables et optimistes à l’égard du profil de rendement des prêts hypothécaires commerciaux. Du côté de l’immobilier canadien, je pense que c’est un peu plus difficile. Je crois que c’est une année où nous allons enfin savoir si nous obtiendrons une réponse à la question du retour au bureau et sur ce qu’il va advenir de l’occupation des locaux. On verra bien. Mais je pense que ça devrait être dans l’extrémité basse. Dans l’extrémité très très solide, si on regarde notre produit d’actions d’infrastructure mondial, il y a énormément de projets dans le monde avec des rendements très intéressants. Que ce soit dans les ports, les éoliennes ou les parcs solaires, nous avons tellement de projets intéressants dans ce produit que je crois, espérons-le, que ce sera une année supplémentaire de solides rendements à deux chiffres pour notre produit d’infrastructure.
INGRID MACINTOSH : Une dernière question. Le nouvel outil dans la trousse de GPTD est celui des produits de base. Quelles sont vos perspectives là-dessus?
DAVID SYKES : Oui, je suis très enthousiaste à l’égard des produits de base, pas nécessairement parce que j’essaie d’établir un plancher ou un sommet. La clé avec les produits de base, c’est qu’ils offrent un certain nombre de caractéristiques du point de vue de la répartition de l’actif dans le portefeuille. Si je pense au rôle que jouent les produits de base, en général, au fil du temps, on a constaté des rendements positifs, ce qui est bien. En général on voit que c’est une protection contre l’inflation, ce qui est bien. Mais ce qui est vraiment cool, de manière générale, c’est que comparativement aux grandes catégories d’actifs, la corrélation est très faible, voire parfois négative, avec les produits de base. Personne ne veut avoir un portefeuille dans lequel tout fonctionne ou, au contraire, dans lequel rien ne fonctionne. Vous voulez plutôt une diversification, avec des corrélations faibles à négatives. C’est vraiment le rôle des produits de base. On a beaucoup travaillé là-dessus. C’est difficile d’être précis, mais, en général, une pondération dans un portefeuille typique à 3 %, 4 %, 5 %, 6 % semble être plus ou moins idéale. En ce qui concerne les produits de base, je suis vraiment satisfait de notre équipe et je pense que c’est un élément essentiel pour bien construire un portefeuille efficace.
INGRID MACINTOSH : Oui, je pense que c’est un excellent aperçu global du portefeuille. Votre objectif dans la vie n’est pas de trouver en permanence les catégories d’actif les plus rentables. C’est de bâtir des portefeuilles résilients, qui feront leurs preuves dans le temps. Je pense que c’est une excellente façon de présenter les choses.
DAVID SYKES : Oui, et Ingrid, juste pour revenir sur ce point, je pense que c’est vraiment important que les gens s’en souviennent. On a des opinions sur le prix du pétrole. On a des opinions sur le blé et le maïs. On a des opinions sur toutes sortes de produits de base. Mais en fin de compte, on est les intendants du capital. On va au travail tous les jours pour nos clients. On fait de notre mieux pour obtenir les meilleurs rendements ajustés au risque pour nos clients. Comme je l’ai mentionné plus tôt, on se voit comme les intendants du capital des clients à très long terme, pas seulement au cours des six ou douze prochains mois, à essayer de trouver une catégorie d’actif qui surpasse toutes les autres.
INGRID MACINTOSH : J’aimerais maintenant parler de certaines choses que nous n’avons pas vues venir en 2023, de certains des grands sujets et de leur possible évolution en 2024. Faites-moi ce plaisir. Tout d’abord, j’aimerais parler des Sept Magnifiques. Pour nos auditeurs, il s’agit des titres dominants qui ont affiché la majeure partie du rendement en 2023, donc Microsoft, Apple, NVIDIA, Amazon, Meta, Tesla et Alphabet. Quelles sont les perspectives pour 2024? Plus d’ampleur dans le marché, ou la même chose?
DAVID SYKES : J’aurais quelques points à souligner. Premièrement, vous avez tout à fait raison. Le marché aux États-Unis en 2023 a vraiment été influencé par ces sept actions. Je n’ai pas les chiffres exacts, mais environ 70 % du rendement total du marché a été attribué à ces sept actions. Mais il y a de bonnes nouvelles. Ce sont de vraies entreprises que vous venez de mentionner. Je veux dire que ce sont de vraies entreprises, qui ont de véritables modèles d’affaires et un avantage concurrentiel avec d’importants flux de trésorerie. Donc de vraies entreprises. Pour nous, la vraie question serait plutôt l’évaluation boursière de certaines d’entre elles. Elles ont tendance à être sur le versant des actions les plus chères. Elles génèrent beaucoup d’attentes. Je pense qu’à l’approche de 2024, si les taux baissent, tant à court terme qu’à long terme, cela devrait permettre de se détourner un peu de ces sept grandes entreprises pour s’intéresser à des actions à petite capitalisation, à moyenne capitalisation et à des actions de valeur qui n’ont pas vraiment participé ces deux dernières années. Le titre moyen de l’indice S&P 500 est stable ou en baisse depuis deux ans. Même si les évaluations des actions des Sept Magnifiques ont tendance à pencher vers le haut, pour l’action moyenne, c’est-à-dire les 493 autres actions, les ratios sont essentiellement alignés sur les moyennes à long terme. Je crois que les Sept Magnifiques vont continuer de dominer, de prendre des parts de marché et de faire ce qu’elles font. Mais pour nous, dans un contexte de taux normalisés, je crois que vous verrez une rotation qui se détournera des Sept Magnifiques. La diversité du marché peut s’étendre et nous permettre d’atteindre de nouveaux sommets.
INGRID MACINTOSH : Un autre thème énorme en 2023 : l’évolution de l’intelligence artificielle, ou IA, dont on a beaucoup parlé. Comment envisageons-nous la situation en 2024? Est-ce que ça change la donne? Quel regard a-t-on là-dessus lorsqu’on examine les catégories d’actif?
DAVID SYKES : Je crois que souvent, les technologies sont surévaluées et que les attentes s’emballent. L’IA est réelle. Elle change tout à fait la donne. Les entreprises continuent d’intégrer l’intelligence artificielle à leurs activités quotidiennes aux fins de productivité et d’économie des coûts. C’est réel. Il y a là une énorme occasion d’améliorer la marge. C’est certain. Je pense que beaucoup d’entreprises essaient encore de trouver ou d’optimiser des façons d’utiliser l’IA à leur avantage. Mais ce sera vraiment sur le versant des économies de coûts. Moins sur celui des revenus selon moi. Mais c’est réel, sans aucun doute. Je pense que c’est l’une des raisons pour lesquelles on soutient que les marges de l’ensemble du marché ont tendance à être stables ou à la hausse, à notre humble avis, plutôt qu’à la baisse, parce qu’on croit que l’intelligence artificielle augmentera considérablement la productivité des entreprises au cours des cinq à dix prochaines années.
INGRID MACINTOSH : Bien. Approfondissons là-dessus. Y a-t-il des secteurs pour lesquels le sujet est prédominant, comme le secteur des semi-conducteurs, ou est-ce un sujet qui interpelle l’ensemble des secteurs?
DAVID SYKES : Je pense qu’il faut envisager ça dans tous les secteurs. De toute évidence, c’est surtout la technologie qui sera concernée. Mais si vous pensez aux services financiers, aux sociétés industrielles, aux soins de santé, même si vous pensez aux sociétés de biens de consommation de base, certains mastodontes utiliseront l’intelligence artificielle pour rendre leurs opérations internes plus efficaces. Qu’il s’agisse de choses aussi banales que de prendre des notes lors d’une réunion et de les consigner, ou de parcourir les bases de données et les textes réglementaires pour trouver des renseignements plus rapidement et avec moins de personnes, il s’agira d’une caractéristique fondamentale qui aura une influence sur presque toutes les entreprises des marchés publics.
INGRID MACINTOSH : C’est en grande partie non réglementé jusqu’à présent. Il sera intéressant de voir comment tout cela se concrétisera en 2024.
DAVID SYKES : Oui, comme toute chose, la technologie a tendance à devancer les législateurs. On n’a pas vu apparaître beaucoup de nouvelles règles en matière d’IA. Mais je suis certain que ça viendra, en dernier lieu.
INGRID MACINTOSH : Je vais faire le lien entre les deux prochains sujets, parce que je pense que c’est probablement quelque chose qui touche presque tous nos auditeurs et tout le monde d’une façon ou d’une autre. C’est le croisement des taux d’intérêt et des prix des maisons. Parlons peut-être des taux d’intérêt. La question que tout le monde se pose est la suivante : Canada, États-Unis, dans quelle mesure ou à quelle vitesse vont-ils reculer? On est au sommet des montagnes russes. À quoi faut-il s’attendre?
DAVID SYKES : Oui, je vais essayer de diviser ça en deux régions. Aux États-Unis, le prêt hypothécaire typique est un prêt hypothécaire à taux fixe de 30 ans. Avant la pandémie, vous pouviez obtenir un taux fixe de 30 ans à 3 % ou 4 %. Il n’y a pas si longtemps, si vous vouliez acheter une nouvelle maison aux États-Unis, votre taux de financement était de près de 8 %. La conséquence de cela a été que les gens ont arrêté de déménager. Si vous aviez une petite maison et envie d’acquérir une plus grande maison, vous ne l’avez pas fait parce que le coût de financement était juste trop élevé à ce moment. Mais paradoxalement, aux États-Unis, si vous avez un prêt hypothécaire sur 30 ans, tout va bien. Votre taux n’a pas augmenté, passant de, disons, 3 % ou 4 % à 8 %, ce qui réduit de beaucoup la sensibilité aux intérêts des consommateurs aux États-Unis. Vous n’avez pas nécessairement constaté un effondrement des prix des maisons. Mais ce que vous avez vu, c’est un effondrement des ventes de maisons. Elles ont littéralement dégringolé, parce qu’avec ces taux d’intérêt élevés, les gens ont tout simplement cessé de chercher à acheter des maisons plus grosses, avec une plus grosse valeur marchande.
DAVID SYKES : C’est un peu différent au Canada. La plupart des prêts hypothécaires au Canada sont à taux fixe de cinq ans et, au début, les Canadiens obtenaient un prêt hypothécaire de cinq ans avec une période d’amortissement de 25 ans à 2 ou 3 % il y a cinq ans. En 2024, 2025, 2026, on va assister à une vague d’échéances qui vont arriver à terme. Environ 60 % des prêts hypothécaires qui seront renouvelés devront être renégociés, pas à 2 % ou 3 %, mais à 5,5 %, 6 % ou 6,5 %. Ce qui va représenter une augmentation importante des versements mensuels, même une augmentation énorme pour la famille canadienne typique. Je pense que du côté canadien, on a clairement constaté les préoccupations du consommateur. On a assisté à un certain ralentissement de l’économie canadienne. Le PIB a été négatif au dernier trimestre, et les prix des maisons ont fléchi. Mais ce fléchissement était de 5 % ou de 10 % de baisse des prix avec un ralentissement de l’activité. Mais en ce début 2024, je pense que la Banque du Canada a été un peu plus ferme en disant : « Bon, écoutez, on en voit le bout. » « C’est en vue, mais nous n’y sommes pas encore ». « Il va falloir être patients ». La Banque du Canada parle de réduire les taux d’intérêt en 2024. Même si pour le moment cela semble difficile à faire avant le second semestre, cela soulagera un peu les Canadiens qui doivent renégocier leur prêt hypothécaire, à l’approche de 2024 ou en 2025.
INGRID MACINTOSH : Vous pensez que ce soulagement arrivera plus tôt aux États-Unis?
DAVID SYKES : Oui, je pense qu’en ce moment, le marché… Prenons la Fed… Lors de la plus récente conférence de presse de Powell, la Fed a déclaré qu’elle procéderait à trois baisses des taux d’intérêt l’an prochain. Le marché pense qu’ils vont baisser cinq fois. On pense que la vérité se trouve quelque part entre les deux. Probablement quatre baisses des taux d’intérêt l’an prochain pour la Fed. En ce moment, le marché pense que la Fed pourrait procéder à des baisses dès mars 2024. On trouve ça un peu audacieux. On serait plutôt enclins à dire mai, juin ou juillet pour la première baisse de la Fed, et à peu près au même moment pour la Banque du Canada. À l’heure actuelle, encore une fois, au Canada, le marché pense que la Banque du Canada procédera à cinq baisses des taux d’intérêt. On trouve ça un peu audacieux, surtout compte tenu du taux d’inflation qui a été publié aujourd’hui, un peu plus élevé que prévu, bien que toujours sur la bonne voie. Il faut que l’on comprenne bien que les taux d’intérêt fonctionnent, mais qu’il faut être patient. Il y a des décalages qui peuvent être longs ou variables. On veut tous voir des taux plus bas, mais ça va prendre un peu plus de temps, à notre avis, que ce sur quoi mise le marché.
INGRID MACINTOSH : Cela m’amène aux questions sur lesquelles les banques centrales se penchent probablement pour prendre ces décisions. Alors, quelles sont les perspectives sur le chômage en 2024?
DAVID SYKES : C’est très intéressant. Les deux banques centrales et, en fait, les banques centrales partout dans le monde, ont indiqué… Cette phrase vient de Powell et de Tiff Macklem. Ils ont dit qu’il était très important de gagner la bataille contre l’inflation. Nous connaissions les effets terribles de l’inflation. Ils ont dit, et je cite qu’ils étaient prêts à « encaisser la douleur ». Je pense que ça voulait dire qu’ils étaient prêts à laisser le taux de chômage augmenter. On a constaté un changement assez important au Canada. On est passés d’un taux de chômage d’environ 5 % à 5,7 % ou 5,9 % d’après les plus récentes publications. Les Services économiques TD, on est d’accord avec eux, pensent que le taux de chômage au Canada devrait atteindre 6,5 %, 6,6 % ou 6,7 %. Et en effet, ce sera douloureux. Je pense que ça va suffire et que ça va ralentir l’inflation d’ici la fin de 2024, qui devrait se rapprocher du point médian de 2 % pour la Banque du Canada. Aux États-Unis en revanche, le marché de l’emploi s’est raffermi. Chaque mois, on assiste à une grosse surprise à la hausse pour les emplois non agricoles. La situation de l’emploi semble beaucoup plus solide. Le chômage a bougé. Il était à 3,5. Nous sommes passés à 3,9, puis 3,7 le mois dernier. Selon les projections actuelles, il est probablement en chemin pour passer au-delà de 4, mais ce sera le véritable signe que nous aurons vaincu l’inflation. Vous allez commencer à voir les chiffres du chômage augmenter, ce sera le signal pour que les deux banques centrales disent : « OK, nous avons accompli notre mission, on va pouvoir commencer à baisser les taux.»
INGRID MACINTOSH : Le dernier point que j’aimerais aborder ici, dans le même chapitre, c’est ce que j’appellerais cette bonne vieille récession. Dans quelle mesure les craintes de récession pour 2024 sont-elles réelles? Pour le moment on a l’impression que l’atterrissage se passe bien, tout en douceur, mais y a-t-il un risque de récession en 2024? Qu’est-ce qui est vraisemblable?
DAVID SYKES : Oui, je crois que le risque est bien réel. Qu’on s’appuie sur une définition technique, avec les deux trimestres négatifs du PIB ou sur une croissance très faible, je pense que c’est très probable. C’est sans doute plus probable pour l’économie canadienne. Comme je l’ai mentionné, les consommateurs du Canada sont beaucoup plus sensibles aux taux d’intérêt. La dette à la consommation est beaucoup plus importante. J’imagine qu’à ce stade, on va assister à ce que j’appellerais une récession au Canada, vous allez probablement voir cela se produire au premier ou au deuxième trimestre l’an prochain. Mais une récession n’est pas la fin du monde, tant qu’il ne s’agit pas d’un PIB négatif de 3, 4 ou 5 %. Tant qu’il s’agit d’une récession modeste, je pense que c’est correct. Encore une fois, il semble que les États-Unis sont un peu plus résilients, un peu plus forts et moins sensibles aux taux d’intérêt. Je ne serais pas surpris qu’il n’y ait pas de récession aux États-Unis, mais, encore une fois, la croissance est très faible. Peut-être à un demi-point de pourcentage avant que la Fed soit à l’aise de recommencer à baisser les taux.
INGRID MACINTOSH : Ils ont les outils nécessaires pour le faire maintenant. Tant au nord qu’au sud de la frontière, avec les taux actuels, au moins ils ont quelques leviers pour gérer ça.
DAVID SYKES : Oui, et je pense que c’est important aussi. Je fais des projections et des prévisions pour 2024, mais comme toute prévision cela suppose beaucoup d’humilité. D’une façon ou d’une autre, il y a un moment où je vais me tromper complètement. Mais aujourd’hui, avec tous les renseignements dont on dispose, c’est ce que nous pouvons prévoir.
INGRID MACINTOSH : On a essayé de tout couvrir. On a essayé de couvrir ce qui préoccupe les gens. L’une des questions que je me pose toujours, et je crois que c’est important de laisser de la place à l’imagination : quels sont les risques ou les occasions dont personne ne parle? À quoi pensez-vous? Qu’est-ce qui vous empêche parfois de dormir? Et, aussi, quelle est l’occasion fugace ou dont les gens ne parlent pas encore pour le moment?
DAVID SYKES : Je crois que le risque est toujours inconnu, en fait on ne sait jamais vraiment. Personne n’aurait pu prédire la pandémie mondiale. Personne n’aurait pu prédire l’ascension de certains dirigeants politiques. Personne n’aurait pu prédire certaines des hostilités et des choses horribles que nous avons vues sur le front géopolitique. Cela vous empêche de dormir la nuit, vous vous en inquiétez, mais il n’y a pas vraiment de solution. Mais je pense qu’en ce qui concerne les occasions, il y a quelques points intéressants. On a parlé de l’IA plus tôt, mais si on pense à la technologie et à l’impact qu’elle aura sur le monde, ce n’est que le début. Si je pense à des choses comme les semi-conducteurs, les grandes usines qui ont besoin de se rééquiper pour l’Internet des objets, et aux nouvelles lignes de production, si je pense à l’électrification du monde grâce aux véhicules électriques, et si je pense au rôle central du téléphone dans le profil des consommateurs à l’échelle mondiale, pour revenir aux semi-conducteurs et aux nouvelles technologies, ce n’est que le début. On a l’impression que le sujet est sur la table depuis longtemps, mais ça va vraiment être un espace intéressant pour beaucoup d’occasions. L’autre chose qui nous enthousiasme, ce sont les outils des sciences de la vie. L’analogie que j’utiliserais est que ce n’est pas comme ça qu’on s’y prend pour trouver de l’or. Pardon, je veux dire que c’est comme ça qu’on s’y prend pour trouver de l’or, en achetant les pioches et les pelles. Ce que je veux dire par là, c’est qu’il y a beaucoup de découvertes qui se feront grâce à l’IA, avec la cartographie du génome humain dans le domaine de la santé, que ce soit par l’entremise de sociétés pharmaceutiques ou de sociétés de biotechnologie. Mais il leur faudra des outils de sciences de la vie pour effectuer les tests nécessaires à leurs recherches. On pense que les sciences de la vie sont une tendance qui permettra de capitaliser et de gagner, mais vous n’avez pas à prendre le risque lié à l’innovation ou le risque lié la recherche et au développement. Parce que, qu’une entreprise réussisse ou non, elle aura de toute façon besoin de ces outils. On trouve vraiment que certaines de ces entreprises du secteur des sciences de la vie sont très, très intéressantes. Encore une fois, c’est le thème de l’innovation. On parle beaucoup de technologie, mais en fin de compte, c’est la façon dont la technologie est utilisée et mise en œuvre par diverses entreprises qui dicte les bénéfices. C’est ce qui stimule la croissance. C’est ce qui favorise un avantage concurrentiel durable, et je pense qu’il y a beaucoup de raisons d’être enthousiaste.
INGRID MACINTOSH : Eh bien, pour quelqu’un qui a commencé l’appel en disant qu’il ne pouvait pas faire de prédictions, vous avez partagé avec nous des perspectives incroyables.
DAVID SYKES : Je peux faire beaucoup de prédictions. Je peux vous dire avec plaisir qui gagnera la coupe Stanley, et je peux vous dire avec plaisir qui gagnera le Super Bowl, mais ma confiance dans ces pronostics est très faible. Encore une fois, j’espère que tout se passera comme je le pense et comme l’équipe le pense. Mais, inévitablement, on se trompera sur quelque chose. Ce en quoi j’ai vraiment confiance, si je pense à notre équipe des titres à revenu fixe, à notre équipe des placements alternatifs et à notre équipe de dette privée, j’ai une confiance incroyable dans leur capacité à analyser les titres de créance, à comprendre les entreprises et à s’assurer que les clients récupèrent leur argent. J’ai une confiance incroyable dans nos gestionnaires de portefeuilles d’actions et dans les processus qu’ils suivent pour analyser l’entreprise, pour analyser un secteur, s’assurer que les entreprises ont un avantage concurrentiel, peuvent générer des flux de trésorerie disponibles et générer des dividendes. J’ai une confiance incroyable en notre équipe des services immobiliers et en sa capacité à trouver un espace de bureau de catégorie A à côté d’un transport en commun. Je suis absolument convaincu que notre équipe responsable des infrastructures trouvera d’excellents investissements partout dans le monde. Je fais totalement confiance à l’équipe et aux processus qu’elle suit. Mais est-ce que tout cela se concrétisera au cours des 12 prochains mois? Probablement pas. Mais sachez que si vous avez une vision à long terme sur 5, 10, 15 ou 20 ans, encore une fois, notre travail en tant qu’intendants du capital des clients est de faire de notre mieux pour analyser les risques et les rendements et générer des rendements ajustés au risque constants au fil du temps.
INGRID MACINTOSH : Et pour nous amener là où nous voulons être. C’était une conversation incroyable. Je croyais que j’allais conclure ici, mais vous avez dit que je pourrais vous demander qui va gagner le Super Bowl et qui va gagner la Coupe Stanley. C’est vous qui l’avez proposé.
DAVID SYKES : OK, je n’en ai absolument aucune idée. Mais d’après ce que j’ai vu, je vais devoir pencher pour les 49ers de San Francisco. Et pour la Coupe Stanley, mon Dieu, je vais avoir des problèmes. Si je secoue rapidement mon cerveau, je vais faire un pronostic audacieux, ce ne sera pas les Maple Leafs, mais les Bruins de Boston.
INGRID MACINTOSH : Eh bien, comme pour les placements, ce que vous ne possédez pas est tout aussi important, alors en ce qui concerne les Maple Leafs, je peux me ranger à votre pronostic. Merci beaucoup. Et à nos auditeurs, j’espère que vous passerez une excellente année 2024. Comme vous le savez maintenant, ce balado est offert sur toutes les principales plateformes de diffusion en continu. Si vous voulez en savoir plus sur nos perspectives, si vous voulez en savoir plus sur les placements avec l’IA et sur les sciences de la santé, vous pouvez écouter TDAM Talks et nos excellents invités. Merci. David, bonne année à vous.
DAVID SYKES : Merci, Ingrid, merci beaucoup.
ANNONCE :
Les renseignements aux présentes ont été fournis par Gestion de Placements TD Inc. aux fins d’information seulement. Ils proviennent de sources jugées fiables. Ces renseignements n’ont pas pour but de fournir des conseils financiers, juridiques, fiscaux ou de placement. Les stratégies de placement ou de négociation devraient être étudiées en fonction des objectifs et de la tolérance au risque de chacun.
Le présent balado peut contenir des déclarations prospectives qui sont de nature prévisionnelle et qui peuvent comprendre des termes comme « prévoir », « s’attendre à », « compter », « croire », « estimer » ainsi que les formes négatives de ces termes. Les déclarations prospectives sont fondées sur des prévisions et des projections à propos de facteurs généraux futurs concernant l’économie, la politique et les marchés, comme les taux d’intérêt, les taux de change, les marchés boursiers et financiers, et le contexte économique général; on suppose que les lois et règlements applicables en matière de fiscalité ou autres ne feront l’objet d’aucune modification et qu’aucune catastrophe ne surviendra. Les prévisions et les projections à l’égard d’événements futurs sont, de par leur nature, assujetties à des risques et à des incertitudes que nul ne peut prévoir. Les prévisions et les projections pourraient s’avérer inexactes dans l’avenir. Les déclarations prospectives ne garantissent pas les résultats futurs. Les événements réels peuvent différer grandement de ceux qui sont exprimés ou sous-entendus dans les déclarations prospectives. De nombreux facteurs importants, y compris ceux énumérés plus haut, peuvent contribuer à ces écarts. Vous ne devriez pas vous fier aux déclarations prospectives.
Gestion de Placements TD exerce ses activités par l’intermédiaire de Gestion de Placements TD Inc. (« GPTD ») au Canada et d’Epoch Investment Partners, Inc. (« TD Epoch ») aux États-Unis. Les deux sociétés sont des filiales en propriété exclusive de La Banque Toronto-Dominion.
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